đŸ”” Techniques vintage pour pĂȘcher le poulpe (1947)

La pĂȘche du poulpe du bord et en bateau. – Un ancien article de 1947 du Chasseur Français dont le titre original est Les hĂŽtes de la mer – La pieuvre.

La pieuvre et le poulpe sont tout simplement des synonymes qui dĂ©signent le mĂȘme animal.
Le terme “pieuvre” a Ă©tĂ© introduit dans la langue française par Victor Hugo dans son roman Les Travailleurs de la mer. Mais les spĂ©cimens de grande taille ne vivent que dans les mers chaudes, et nos cĂŽtes sont dĂ©pourvues de tels monstres. J’en ai cependant vu ou pris de plus de 5 kilos, ayant une envergure de prĂšs de 2 mĂštres, ce qui n’est dĂ©jĂ  plus une petite araignĂ©e.

📰 Les hĂŽtes de la mer – La Pieuvre

1940-1949

« Il me semble voir le geste de rĂ©pulsion — peut-ĂȘtre de frayeur — de nombre de lecteurs, la pieuvre (ou poulpe) jouissant, en effet, du triste privilĂšge d’ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme un animal fantastique et terrible.

Victor Hugo nous en a laissé une description horrifique dans Les Travailleurs de la mer, et il faut bien convenir que Gilliatt était dans une posture périlleuse.

Gilliatt se débat avec la pieuvre géante, illustration des «Travailleurs de la Mer» de Victor Hugo (1802-1885) 1866
Gilliatt se débat avec la pieuvre géante, illustration des «Travailleurs de la Mer»
de Victor Hugo (1802-1885) 1866

Mais les spĂ©cimens de grande taille ne vivent que dans les mers chaudes, et nos cĂŽtes sont dĂ©pourvues de tels monstres. J’en ai cependant vu ou pris de plus de 5 kilos, ayant une envergure de prĂšs de 2 mĂštres, ce qui n’est dĂ©jĂ  plus une petite araignĂ©e.

DĂ©crivons succinctement cet animal de cauchemar. Imaginez un Ă©norme sac, recouvert d’une sorte de capuchon, pourvu de deux gros yeux saillants et d’une forte mĂąchoire cornĂ©e, en forme de bec de perroquet ; de ce corps partent, en Ă©ventail, huit longs bras, garnis de deux rangĂ©es de ventouses (ou suçoirs), plusieurs centaines, qui se collent Ă  la victime immobilisĂ©e et en extraient la substance.

Ces tentacules ont une force irrĂ©sistible et ligotent le plus puissant nageur s’il s’est laissĂ© saisir : Ă©pouvante, paralysie, mort affreuse et rapide, tel est son lot.

Heureusement, le fait est trĂšs rare, et il est assez facile Ă  un homme qui ne perd pas son sang-froid de se dĂ©barrasser de ce redoutable adversaire : ou en lui coupant la tĂȘte avec les dents, comme opĂšrent beaucoup de pĂȘcheurs professionnels, ou, plus simplement, en lui retournant son capuchon ; dans les deux cas, la bĂȘte est hors de combat.

Je doute fort qu’un novice adopte le premier procĂ©dĂ© — ; moi non plus, d’ailleurs.

Ceci dit, allons Ă  la pĂȘche : elle se pratique du bord ou en bateau.

PĂȘche du bord.

— On recherchera les digues Ă  gros blocs jetĂ©s pĂȘle-mĂȘle, ayant entre eux de vastes excavations oĂč la mer s’engouffre ; les rochers fendillĂ©s, cassĂ©s, seront aussi des repaires Ă  pieuvres, mĂȘme ceux situĂ©s trĂšs prĂšs du bord.

Le pĂȘcheur sera muni de deux longues perches de bambou, fortes et rigides, d’une seule piĂšce. À l’extrĂ©mitĂ© de l’une sera fixĂ©e une touffe de feuilles d’olivier, argentĂ©es en dessous, ou des lambeaux d’étoffe rouge. L’autre perche sera terminĂ©e par un trĂšs gros hameçon ou par un crochet Ă  ardillon, fortement assujetti. Et c’est tout comme matĂ©riel.

Le pĂȘcheur fouillera profondĂ©ment les trous, les caves, les fissures avec sa perche feuillue, la dandinant sans cesse, et, soudain, il verra ou sentira des tentacules saisir le leurre ; avec sa deuxiĂšme perche armĂ©e, il crochera la bĂȘte, au corps si possible, et tĂąchera de la sortir rapidement, avant qu’elle ne se fixe au roc par ses puissantes ventouses.

Il dĂ©posera sa prise dans un sac ou un panier Ă  large ouverture et la dĂ©crochera ensuite ; mais, s’il ne craint pas la rĂ©pugnante sensation d’ĂȘtre saisi par les tentacules et si la pieuvre n’est pas trop grosse, il la tuera dĂšs sa sortie de l’eau par un des deux procĂ©dĂ©s prĂ©cĂ©demment indiquĂ©s.

Pieuvre en Méditerranée. - Banyuls-sur-Mer, 2004
Pieuvre en MĂ©diterranĂ©e. – Banyuls-sur-Mer, 2004

PĂȘche en bateau.

— Rechercher les fonds rocheux de quelques mĂštres seulement. Des gouttelettes d’huile, projetĂ©es Ă  la surface de la mer, permettront d’apercevoir trĂšs nettement le fond.

Remarquez-vous un tas de galets, gros comme le poing, tous rĂ©unis ? Observez attentivement et vous verrez les extrĂ©mitĂ©s de quelques tentacules hors des cailloux : l’araignĂ©e est Ă  l’affĂ»t.

Les deux perches sont remplacées par une corde terminée par un fort grappin plombé, à trois ou quatre branches, agrémenté de feuilles ou de chiffons.

On descend le leurre sur l’emplacement reconnu — ou supposĂ© — habitĂ© et on le dandine ; brusquement, les cailloux s’écartent, un tentacule — ou plusieurs — jaillit et enlace le grappin ; d’un coup sec sur la corde, on ferre l’animal que l’on remonte Ă  grandes brassĂ©es ; la tentative manquĂ©e, on peut recommencer Ă  vue, car le monstre n’est pas parti.

Il va lancer ses grands bras de tous cĂŽtĂ©s, cherchant un point d’appui : le rebord de la barque, vos bras … ou votre tĂȘte ; Ă  vous de faire le nĂ©cessaire pour vous dĂ©barrasser de la visqueuse Ă©treinte, ce qui est un jeu pour les initiĂ©s, insensibles Ă  ces manifestations de colĂšre ou de dĂ©sespoir.

Il est Ă©vident que, si la bĂȘte est grosse, des prĂ©cautions sont indispensables, mais je le rĂ©pĂšte : ne pas perdre son sang-froid, tout est lĂ .

Vous voyez donc que la pĂȘche de la pieuvre est trĂšs facile Ă  pratiquer.

Certains pĂȘcheurs simplifient mĂȘme leur matĂ©riel et n’emploient, dans la pĂȘche du bord, qu’une seule perche : le gros grappin est alors dissimulĂ© parmi les feuilles et les chiffons. Mais, en fouillant les trous, on s’accroche sans cesse, on Ă©mousse les pointes du grappin et mĂȘme on risque de les briser.

Et maintenant, pourquoi capture-t-on la pieuvre, allez-vous penser. Mais pour la manger, tout simplement.

Devant la grimace de dĂ©goĂ»t que je devine, je vais vous faire une confidence : vous en avez tous mangĂ©, peu ou prou, si ce n’est fraĂźche, tout au moins en conserve, car j’ai ouĂŻ dire — je n’affirme rien pour rester dans les limites du doute — que « certaines » boĂźtes Ă©taient constituĂ©es par de la chair de poulpe.

Et ce n’était pas mauvais, n’est-ce pas ? D’ailleurs, mangĂ©e fraĂźche, avec une sauce pimentĂ©e et de la tomate, la pieuvre fournit un mets trĂšs apprĂ©cié ; nos marchĂ©s de la cĂŽte en sont abondamment pourvus et elle se vend assez cher.

Les pĂȘcheurs de congres utilisent les tronçons de tentacule pour garnir les hameçons de leurs cordeaux de fond, ce qui constitue un appĂąt de premier ordre.

Voici donc dĂ©truite la lĂ©gende de la pieuvre terreur des gens frĂ©quentant la mer : pĂȘcheurs, baigneurs.

Certes, un nageur saisi par une grosse bĂȘte peut passer un mauvais moment, mais, s’il reste maĂźtre de lui et peut saisir la bĂȘte par la tĂȘte, il est sauvĂ©. Ce qu’il doit Ă©viter surtout, c’est de se laisser ligoter les bras.»

Poulpe Ă  la ligne
Poulpe Ă  la ligne

Infos source

  • Source : Le Chasseur Français N°616 Octobre 1947 Page 577
  • Auteur : Marcel LAPOURRÉ.
  • Titre : Les hotes de la mer – La pieuvre
  • Rubrique : La pĂȘche

En résumé

En rĂ©sumĂ©, c’est un article Ă  visĂ©e pratique, destinĂ© aux pĂȘcheurs ou aux amateurs de techniques de pĂȘche, avec une touche d’anecdote et une volontĂ© de dĂ©mystifier la pieuvre vue comme crĂ©ature effrayante

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Notes :

📌 Les images illustrant cet article (carte postale ancienne, photo personnelle) ont Ă©tĂ© ajoutĂ©es par mes soins. Le texte original n’en contenait pas.

⚠ Note : certaines techniques dĂ©crites ici peuvent ĂȘtre aujourd’hui interdites ou rĂ©glementĂ©es. VĂ©rifiez toujours les lois en vigueur avant de pratiquer.

Article publié initialement en 2016.

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